Rien ne prédisposait Christèle Ageorges à partir vivre à la campagne. La styliste d'intérieur vivait pleinement sa vie à Paris et n'envisageait absolument pas de changer son quotidien. C'est la découverte fortuite du village de Lectoure qui va déclencher la volte-face. L'acquisition d'une résidence secondaire dans ce bourg du Gers va vite se transformer en projet de vie. Christèle va être comme happée par la maison et va tout quitter pour y ouvrir un sublime lieu d'hébergement et d'événementiel.
Pendant près de trente ans, Christèle Ageorges a vécu à Paris une vie passionnante comme styliste d'intérieur pour de nombreux magazines de décoration. Une vie citadine classique, rythmée par le travail, les enfants, les sorties, les dîners entre amis, les escapades et les voyages. Confortablement installés dans leur petit atelier du XVème arrondissement de la capitale, Christèle et son mari n'envisageaient absolument pas de changer de rythme et encore moins d'environnement. Pourtant, l'été 2017, lors d'une marche sur le Chemin de Compostelle, le couple tombe sous le charme du village de Lectoure dans le Gers. De retour à Paris, ils envisagent pour la premier fois l'acquisition d'une résidence secondaire. Ils rachètent la Manufacture Royale de Lectoure, ancienne tannerie de cuir du XVIIIème siècle. De grands travaux débutent mais au fur et à mesure que la maison prend forme, un projet de vie commence à se dessiner et l'envie de s'y installer à plein temps émerge. L'été 2021, ils y aménagent, et en 2022 la maison d'hôtes ouvre ses portes. Christèle adore sa nouvelle vie et n'échangerait pour rien au monde avec sa vie d'avant...contre toute attente!
Interview
Christèle, peux-tu nous décrire ton parcours et nous parler de ta vie d'avant?
"Je suis née et j'ai grandi à la campagne, à La Châtre dans l'Indre, pays de George Sand. Je n'avais qu'un rêve; avoir mon baccalauréat et partir faire mes études à Paris pour y vivre une vie trépidante. J'ai étudié l'Histoire de l'Art et la Communication car j'envisageais d'être journaliste. Tout juste sortie de l'école, j'ai eu la chance d'être embauchée comme styliste photo par Claude Berthod, la rédactrice en chef de Maison Française. Après quelques temps, j'étais sollicitée par des clients extérieurs, et je suis devenue pigiste pour d'autres magazines dont ELLE déco, Marie-Claire Maison, Côté Ouest etc. et pour des catalogues de marque. J'ai exercé ce métier pendant trente ans. "
Comment est né le projet d'ouvrir une maison d'hôtes?
" J'adorais ma vie de styliste d'intérieur à Paris et il n'y avait absolument aucun signe annonciateur d'un quelconque changement! Sauf peut-être, lorsque je partais en vacances, je m'imaginais toujours décorer la location ou la chambre d'hôtes que j'occupais. En 2017, nous marchions sur le chemin de Compostelle avec mon mari et mes deux enfants (chaque année depuis 2011, nous parcourons une portion d'une centaine de kilomètres du Chemin et reprenons l'année suivante là où nous nous étions arrêtés l'été précédent).
Cette année là, nous traversions le Gers et les magnifiques paysages de "La Petite Toscane". En passant par le village de Lectoure, nous avons ressenti un véritable coup de foudre! A notre retour à Paris, mon mari et moi commencions à éplucher les annonces immobilières. Pour la première fois, nous voulions acheter une résidence secondaire pour nos vacances et en vue de nos vieux jours.
Nous avons visité cette ancienne tannerie du XVIIIème siècle qui ne nous a pas spécialement plu au premier abord; c'était une ancienne maison de retraite à l'abandon qui avait été squattée... Elle était très délabrée et il fallait une faculté de projection énorme pour évaluer tout son potentiel. J'étais moins motivée que mon mari qui a fini par me persuader. C'est en cherchant le financement des travaux que le projet de maison d'hôtes a commencé à voir le jour. En plus de l'hébergement, j'y voyais un lieu ouvert pour des shootings et l'accueil d'évènementiel: séminaires, retraites yoga, fêtes de famille, expos, etc.
Encouragés par nos enfants, nous avons vendu notre atelier à Paris en 2021 pour nous consacrer pleinement à ce dessein. Jusqu'à l'ouverture en 2022, j'ai fait des allers-retours à Paris pour terminer mes missions... à contrecœur. Je ne voyais plus Paris sous le même angle, et ce sentiment n'a fait que renforcer mon désir de vivre au calme et au plus près de la nature. "
Quel est ton rapport à Paris maintenant?
" Je ne veux plus aller à Paris! Je n'en éprouve absolument plus le besoin. C'est une source de stress incommensurable: le monde, la pollution, les embouteillages... Avec du recul, je ne sais pas comment j'ai pu supporter cela. Je peux acheter ce que je veux sur internet et j'ai découvert que la province avait une activité culturelle très riche. Rien qu'à Lectoure, il y a un Centre d'Art et de Photographie et un festival de musique l'été. Et si j'ai besoin d'aller dans une grande ville, Bordeaux ou Toulouse me suffisent amplement! "
Qu'aimes-tu le plus dans ta nouvelle vie champêtre? Quels sont les inconvénients?
" J'adore profiter de la douceur de vivre du village. Chaque matin, lorsque j'ouvre mes volets et que je vois la chaîne des Pyrénées au loin, je ressens une grande gratitude. J'admire la beauté de la nature tous les jours, même l'hiver. Je me sens beaucoup plus connectée à la Terre.
L'autre point très important est notre vie sociale. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, elle est intense et je rencontre plus de gens qu'à Paris! Tout d'abord, il y a les hôtes que j'accueille et avec lesquels nous partageons une sensibilité commune. C'est l'occasion de belles rencontres. Ensuite, nous avons tissé beaucoup de liens dans le village qui est cosmopolite, rempli d'anciens parisiens et d'étrangers venus de partout. Enfin, nous profitons beaucoup plus de nos amis; nous avons troqué des dîners de quelques heures contre de longs week-ends avec eux.
Sincèrement, je ne vois aucun point négatif à ma nouvelle vie. En me creusant la tête, je dirais qu'une urgence médicale nous obligerait à aller à Bordeaux ou à Toulouse, et que les voyages transversaux dans l'Hexagone sont moins facilités que les déplacements vers Paris. Lorsque mon mari doit se rendre à Lyon, il n' y a pas de grands axes Est-Ouest. Enfin, c'est occasionnel et il suffit de s'organiser ...:-)"
Quelle est ta pièce ou ton objet préféré de la maison?
" Nous passons notre vie dans la cuisine de la maison. Nous y travaillons, partageons les repas. Elle est lumineuse, donne sur le jardin. Je m'émerveille aussi de petits détails dans toute la maison que je parcours régulièrement. "
Peux-tu nous décrire ta routine néo-rurale?
" Mon quotidien dépend des réservations de la maison d'hôtes. En général, le matin, je monte boire un café dans Lectoure où je retrouve des amis. On se réunit également à l'heure de l'apéro. J'adore aussi faire le marché du vendredi matin que je ne manque pour rien au monde!"
Quelles sont tes adresses gersoises favorites que tu recommandes aux lecteurs de Mastic?
" Côté gastronomie, je recommande le restaurant Racine à cinq minutes de la maison. Il est tenu par le jeune chef belge Lionel Creteur et sa compagne canadienne. Ils cuisinent les produits de la nature et mettent en valeur ceux qui les produisent. J'aime aller chiner les dimanches matins d'été à la brocante de Fources qui se tient sous les platanes de la place ronde du village. J'aime aussi aller chez Monsieur l'Epicier, une épicerie de village à Saint-Clar, qui vend du local, du bio et du vrac."
Quels sont les comptes Instagram qui t'inspirent?
" Je suis le compte de mon amie journaliste @marieannebruschi pour rester connectée à l’actualité parisienne. J'aime le compte de l'architecte d'intérieur @romainchancel pour notre attrait commun des lieux abandonnés, et le compte de @deareverest pour sa vision de l’art de vivre."
La Manufacture Royale de Lectoure
19, rue Claude Ydron 32700 Lectoure
↘ lamanufactureroyaledelectoure I Instagram @lamanufactureroyaledelectoure
photo de couverture © jérôme galland
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